Le bétyle d’Eusebe : un OVNI miniature ? 21 mars 2016

Afin de prouver l’existence de civilisations terrestres antédiluviennes, ou le passage d’extraterrestres parmi nous, les partisans de ces thèses ont avancé beaucoup d’idées, examiné de nombreuses pistes, proposé bien des artefacts, ou discuté passionnément les propos d’auteurs de recueils anciens.

 

C’est justement l’un de ces textes que je vous invite à découvrir dans cet article.

 

Il s’agit d’un extrait de « La vie du philosophe Isidore », rédigé par Damascius, le philosophe néoplatonicien du VIe siècle.

 

Des passages de ce livre, aujourd’hui perdu, ont été conservés et consignés dans la « Souda », un lexique byzantin du Xe siècle, ainsi que dans la bibliothèque (codex 242) du patriarche de Constantinople Photius (820-891).

 

Voici pour l’extrait en question, fort curieux :

 

“ J’ai vu (dit Damascius) le bétyle se mouvoir dans l’espace et je l’ai vu, tantôt caché dans les vêtements de son gardien, tantôt porté dans ses mains. Le nom de ce gardien du bétyle était Eusèbe ; il racontait qu’il lui était venu un jour une envie insolite de s’éloigner de la ville d’Emèse, vers minuit, pour s’en aller très loin vers la montagne où est bâti un antique temple d’Athéna.

Il était arrivé très vite au pied de la montagne e t ils ‘y était assis comme on le fait pour se reposer d’une marche. Il vit tout à coup une boule de feu qui tombait du ciel et un lion énorme qui s’approchait d’elle ; cet animal disparut aussitôt.

 

Eusèbe courut tout de suite vers la boule alors que son feu s’éteignait déjà et il vit que c’était le bétyle.

Il le ramassa et lui demanda à quel dieu il appartenait ; la pierre répondit qu’elle appartenait à Gennaios -un dieu que les gens d’Héliopolis adorent dans le temple de Zeus où ils ont érigé une statue à forme de lion.

 

Il emporta, dit-il, le bétyle chez lui. Il n’avait pas parcouru moins de 200 et 10 stades d’une seule traite au cours de la même nuit. Eusèbe, par ailleurs, ne maîtrisait pas les mouvements du bétyle comme d’autres maîtrisent d’autres objets, mais il demandait et priait, et la pierre écoutait ses incantations.

Raphaël, l’école d’Athènes, avec au centre Aristote et Platon

 

(…) C’était (…) une sphère parfaite, d’une couleur blanchâtre et d’un empan de diamètre, mais parfois elle se dilatait et parfois elle rétrécissait. D’autres fois, elle se teintait de pourpre. Il nous expliqua les caractères gravés dans la pierre, imprimés dans une teinte qu’on appelle le vermillon et qu’il avait reproduits sur un mur.

 

C’est avec leur aide qu’il rendait au postulant l’oracle désiré et la pierre émettait un léger sifflement

qu’Eusèbe interprétait. (…) Pour moi, je croyais que l’objet dit bétyle était une sorte d’être divin. Isidore, de son côté, lui accordait plutôt la nature d’un démon, car il était mu par quelque démon.

 

Ce démon n’était ni d’une espèce nuisible ni d’une nature proche de la matière, il n’était non plus ni de ceux qui appartiennent à une espèce immatérielle ni de ceux qui sont tout à fait purs.”

 

De quelle chose peut-il s’agir ici ?

 

Quel est cet objet d’une vingtaine de centimètres environ, qui est tombé du ciel dans le désert syrien ?

 

Quelle est la nature de cette pierre couverte de caractères, qui peut léviter, parler, rapetisser, s’agrandir, changer de couleur, émettre un sifflement en réponse à une question ?

 

Notez la façon dont les deux personnages tiennent les sphères, cela rappelle le récit de Damascius (agrandissement de la précédente image)

 

Cet artefact, à ma connaissance, n’a aucun équivalent à ce jour.

 

Sa technologie est non seulement en avance sur la science de l’époque, mais aussi sur celle de ce début du XXIe siècle ! On peut comprendre la perplexité d’Isidore et de son disciple, puisque nous la partageons.

 

Le fait de parler de bétyle (du sémitique bet’el : sanctuaire du dieu) ne nous avance pas beaucoup. Sa provenance est tout aussi énigmatique.

 

Examinons quelques pistes

 

S’agit-il d’une technologie E.T. ?

 

Mais les extraterrestres n’ont pas l’habitude de laisser des traces palpables de leur passage. Tous ceux qui recherchent des preuves de leur existence le savent très bien.

 

Les rares artefacts qu’on nous dit provenir d’eux, soit se dissolvent d’eux-mêmes, soit leur banalité ne permet pas de les dissocier d’un objet terrestre, soit leur étrangeté les rend inclassables (les implants du Dr Leir, par exemple).

 

Le bétyle d’Eusèbe se distingue d’eux par sa matérialité affirmée et l’impression qui se dégage de se trouver

devant un objet bien de chez nous, mais dont l’hypersophistication ne nous permet pas d’en comprendre l’usage.

Ce bétyle pourrait dès lors être une preuve de la technologie perdue d’une civilisation antédiluvienne inconnue ?

 

Cet objet tombé du ciel pourrait-il expliquer l’existence des cartes géographiques antiques, comme celle de Piri Raïs, situant avec précision le continent antarctique, alors que sa découverte est récente ?

 

Les travaux de Hapgood semblent bien indiquer que les auteurs originels de ces cartes opéraient à partir de données obtenues d’une grande altitude.

 

Le bétyle d’Eusèbe serait-il donc une sorte de satellite (ou le morceau d’un satellite) lancé il y a plus de

6000 ans par une civilisation terrestre inconnue, pour cartographier la Terre, et qui serait retombé dans le désert syrien au VIe siècle ?

 

C’est-à-dire des siècles et des siècles après la disparition des initiateurs de cette entreprise ?

 

D’autres hypothèses peuvent être formulées , comme celle d’une invention de notre futur qui se serait égarée dans le passé, ou encore une invention remarquable et oubliée depuis, d’un génie méconnu du VIe siècle.

 

Cette dernière solution est également séduisante, à première vue : après tout l’Antiquité ne nous a-t-elle pas livrée la machine d’Anticythère, la colombe volante d’Archytas ou l’oiseau artificiel d’Olympie ?

 

Mais, une fois de plus, il faut bien avouer que cette technologie dépasse largement le cadre des connaissances de l’Antiquité gréco-romaine.

Pour tenter d’y voir un peu plus clair, penchons-nous sur le contexte de l’apparition du bétyle.

 

Et là, surprise ! nous nous retrouvons un instant en terrain de connaissance.

 

En effet, la genèse de l’aventure d’Eusèbe ne déparait pas des modernes rencontres ufologiques : on y côtoie ainsi l’appel, le rendez-vous forcé, la relativité temporelle et spatiale, avec cette grande distance franchie en un laps de temps très court (une quarantaine de kilomètres pour Eusèbe).

 

L’apparition du lion intrigue cependant.

 

La présence de cet animal paraît déplacée, incongrue, dans le contexte. Une présence tout aussi hors cadre est parfois attestée, dans l’Antiquité, lors d’évocations de divinités par les théurges (Oracles chaldaïques, fragment 147, Edouard des Places) et, dans ce cas, il est lié à des bouleversements cosmiques ; on le mentionne aussi lors de l’utilisation d’armes radiantes inconnues.

 

Deux hymnes mésopotamiens où il est question de lions, l’un dédié à Nergal, l’autre à Era et parlant des Dieux-Sept, semblent évoquer des catastrophes liées à l’utilisation d’armes nimbées de lumière.

 

Le célèbre bétyle trouvé dans le temple des lions ailés à Pétra

 

Macrobe, dans ses « Saturnales » (I, 20, 12) raconte également l’épisode d’une guerre contre Gadès avec l’incendie d’une flotte par ce qui semble être une arme futuriste : les navires avaient été brûlés par des rayons semblables à ceux que l’on représente autour du soleil.

 

Dans ce contexte également, le narrateur mentionne une apparition insolite de lions, brusquement dressés sur la proue des vaisseaux.

Nous noterons qu’à chaque fois le lion est associé à une technologie anachronique pour l’époque.

 

Lors d’opérations magiques, les théurges antiques réussissaient-ils à faire apparaître dans leur environnement des spécimens en usant d’une technologie inconnue ?

 

L’ hypothèse est certes fantastique, mais les données en notre possession le sont tout autant…

 

Quoiqu’il en soit, la nature du bétyle d’Eusèbe me semble aussi énigmatique que celle du Graal moyenâgeux.

 

 

On peut d’ailleurs leur trouver des points de convergence.

 

Ainsi, vers 1220, Wolfram von Eschenbach, dans son « Parzival », semble tout aussi dérouté par la nature du Graal, que nous autres à propos du bétyle syrien.

 

Le poète allemand a beaucoup de difficultés à le cataloguer : il le nomme d’abord « ein dinc », une « chose », avant de l’appeler « une pierre ».

Cette pierre serait également tombée du ciel sur la terre.

 

Capable de prodiges, elle était source de vitalité, d’abondance, d’immortalité. Et l’une de ses merveilleuses propriétés était de choisir elle-même son gardien, en diffusant ses ordres par des messages inscrits sur sa surface (« Parzival », XV, 781; XVI, 788; XVI, 796).

 

Le Graal était-il en réalité un autre bétyle ?

 

À moins qu’il ne s’agisse tout simplement du même objet, passé de main en main, à travers les siècles.

 

Folles conjectures ? peut-être…

 

Pour finir, et pour ajouter encore une touche d’étrangeté à cette énigme, relevons cette scholie annotée par un copiste anonyme du manuscrit de Venise (relatant l’aventure d’Eusèbe) appartenant au cardinal Bessarion (XVe siècle) :

 

« Moi-même, j’ai entendu parler en Grèce, par les habitants, d’un prodige démoniaque semblable qui s’est manifesté dans la région du Parnasse. Ils en disaient des choses encore plus extraordinaires qu’il vaut mieux taire que raconter. »

 

On n’en sait pas plus. Hélas.

 

SOURCE :  Fabrice Kircher/Top Secret N°19

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