La gravitation quantique pourrait être testée grâce à un couple pulsar-trou noir supermassif - 17 mars 2017

Le physicien Steven Giddings. Il a passé sa thèse avec Edward Witten, le grand physicien de la théorie des cordes et lauréat de la médaille Fields en mathématiques.

L'un des effets les plus spectaculaires impliqués par les théories à basse masse de Planck aurait été la production dans les collisions de protons au LHC de minitrous noirs s'évaporant par effet Hawking.

 

L'un des chercheurs à qui l'on devait cette prédiction fascinante n'est autre que Steven Giddings. Or depuis quelques années, il a eu une nouvelle idée concernant la physique quantique des trous noirs qui permettrait peut-être de voir des effets de gravitation quantique même en supposant que la masse de Planck est bien d'environ 1019 GeV, comme les chercheurs le pensaient avant la fin des années 1990 et comme il semble que ce soit finalement, et malheureusement, bien le cas.

 

 

Comme Hawking et Susskind, Steven Giddings est préoccupé par le paradoxe de l’information avec les trous noirs.

 

Pour préserver les lois de la mécanique quantique qui conduisent des trous noirs à s'évaporer, il faut que d'une façon ou d'une autre, l'information qui est tombée dedans puisse en ressortir, malgré l'existence d'un horizon des événements.

 

Des effets quantiques doivent connecter ce qui est à l'intérieur d'un trou noir avec le rayonnement qu'il peut émettre par effet Hawking.

 

Un espace-temps quantique trouble autour des trous noirs

 

 

Un premier indice de ce qui peut se passer consiste à appliquer les inégalités de Heisenberg à la structure de l'horizon des événements.

 

[Son principe d'incertitude, découvert en 1927, affirme que la détermination de certains couples de valeurs, par exemple la position et la quantité de mouvement, ne peut se faire avec une précision infinie.

 

On peut le formaliser sous la forme d'un produit :

 

Δpx Δx ≈ h

 

où Δpx représente l'indétermination sur la quantité de mouvement, et 

Δx l'indétermination sur la position et h la constante de Planck.

 

Ce produit ne peut être inférieur à la constante h⁄4π (ou bien ħ⁄2, où ħ est la constante de Planck réduite)

et donc toute précision dans la mesure d'une des deux quantités se fait au détriment de l'autre.

 

Cette incertitude n'est pas liée à la mesure, mais est une propriété réelle des valeurs en question :

 

améliorer la précision des instruments n'améliorera pas la précision de cette mesure simultanée..]

 

La théorie d'Einstein classique nous dit que pour un trou noir isolé, cet horizon ne doit pas changer et avoir la même taille, si bien que d'une certaine façon, la surface qui la définit à une position bien définie.

 

Mais si l'espace-temps peut vibrer sous forme de gravitons, donc des particules soumises aux inégalités de Heisenberg connectant des positions et des vitesses dans un flou quantique irréductible, cela ne se peut.

 

L'horizon n'étant pas complètement défini, une particule juste en dessous d'elle pourrait de temps en temps se retrouver en fait au-delà et donc pouvoir s'échapper sans devoir dépasser la vitesse de la lumière.

 

Une vue d’artiste d’un pulsar et ces deux faisceaux d’ondes radio en orbite autour d’un trou noir. 

Plus généralement, comme Steven Giddings pense l'avoir établi, l'espace-temps au voisinage d'un trou noir pourrait être modifié par des effets quantiques.

 

De sorte que la propagation de signaux, que ce soit des rayons lumineux, des ondes radio ou des ondes gravitationnelles, en serait modifiée, peut-être de telle façon qu'on pourrait voir ses effets avec des instruments comme l'Event Horizon Telescope (dans ce cas précis, pas avec le trou noir supermassif de la Voie lactée mais avec celui de M87).

 

Inspirés par ces résultats, d'autres chercheurs viennent de déposer sur arXiv, un article dans lequel ils suggèrent cette fois-ci que les effets de gravité quantique avancés par Giddings pourraient être observés dans le cas où un pulsar constitue un système binaire avec un trou noir.

 

Les radiotélescopes devraient ainsi être capables d'observer des décalages dans les temps d'arrivée des signaux émis par le pulsar, lorsque ces signaux passent suffisamment proche du trou noir, du fait des fluctuations quantiques de l'espace-temps envisagées par Giddings.

 

L'effet n'est pas sans rappeler celui bien connu en relativité générale classique sous le nom d'Effet Shapiro.

 

 

Dans le cas des trous noirs stellaires de 30 masses solaires, les décalages seraient de l'ordre de 0,3 milliseconde.

 

Pour le cas du trou noir supermassif de notre Voie lactée ils devraient être de l'ordre de... 40 secondes.

 

 

Espérons que d'ici une dizaine d'années, nous en saurons beaucoup plus.

 

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