Approche Sociologique d'une découverte éventuellement extraterrestre appliquée au cas concret des "momies tridactyles du Pérou" par Sylvie JOUBERT - Juin 2019

 

“En matière d’ufologie, le sociologue n’est pas là pour dire si ce que rapportent les témoins est vrai ou faux, son rôle consiste plutôt à étudier la façon dont se comportent les humains vivant une expérience de rencontre avec un être non humain, avec à un objet non identifié, voire avec des corps non identifiés ; sur ce dernier point, le cas de l’affaire Nazca est sociologiquement intéressante. Pourquoi ?”

Sylvie Joubert

 

Le MUFON FRANCE nous invite à partager  la 1ère partie (sur deux) d’un travail de Sylvie Joubert, intitulé “Jeu d’apesanteur et Ufologie : le cas des momies tridactyles du Pérou”.

 

Un magnifique texte de sociologie appliquée...

Lien vers le livre Citoyenneté Galactique, écrit par Sylvie Joubert :

http://mufonfrance.com/2018/03/sylvie-joubert-citoyennete-galactique/


 

 

Jeu d’apesanteur et ufologie : le cas des momies tridactyles du Pérou

 

En matière d’ufologie, le sociologue n’est pas là pour dire si ce que rapportent les témoins est vrai ou faux, son rôle consiste plutôt à étudier la façon dont se comportent les humains vivant une expérience de rencontre avec un être non humain, avec à un objet non identifié, voire avec des corps non identifiés ; sur ce dernier point, le cas de l’affaire Nazca est sociologiquement intéressante.

 

Pourquoi ?

 

Nous voici, nous, humains, confrontés à d’étranges corps extraits d’un vague endroit du désert péruvien, corps que l’on dirait échappés du vaisseau de « Rencontre du IIIe type »... A quelques doigts près ! Tandis que quelques-uns d’entre nous les envisagent possiblement intra ou extraterrestres, d’autres parlent de supercherie, le reste de la planète restant dans l’ignorance totale de la découverte. Les contrastes sont flagrants, c’est donc entre ignorance et chamailleries incessantes que l’affaire Nazca évolue.

 

À ce jour, nul ne détient la vérité absolue sur l’origine de ces corps tridactyles du Pérou, toutefois, alors que le sujet fait polémique, plusieurs dizaines de scientifiques et laboratoires continuent leur travail d’investigation armés de technologies médicales high-tech pour percer le mystère de ces corps. Chacun peut s’informer des premiers résultats que je trouve, à titre personnel, troublants et probants, mais ce n’est pas de cela dont parle cet article. En tant que personne, j’ai comme tout un chacun envie de connaître l’ultime vérité concernant cette affaire des momies tridactyles du Pérou, par contre, en tant que sociologue il m’est

parfaitement égal qu’il s’agisse d’une découverte exceptionnelle pour l’humanité ou bien d’un simple « fake », puisque seuls m’intéressent nos comportements de groupe dans le contexte en question.

 

Je n’hésite pas à dire que l’affaire est sociologiquement* passionnante et que la

façon dont notre espèce l’a gérée jusqu’à présent reste très significative de ce que nous sommes, également de ce que nous ne savons pas être à ce jour. Laissez-moi m’expliquer de cela en quelques feuillets, de la façon la plus simple et la plus concrète possible.

 

J’ai choisi pour illustrer mon propos cette affaire tridactyle pour une raison simple : j’ai suivi de près son évolution qui est, rappelons-le, non close, puisque les analyses sur les corps continuent sous la responsabilité de scientifiques pluridisciplinaires et de laboratoires internationaux. Un exemple rend toujours la lecture plus facile, car cela apporte de la pesanteur et de la matérialité à l’idée, néanmoins retenez que le raisonnement tripartite qui est le mien dans cet article pourrait s’appliquer à d’autres situations ufologiques non

péruvienne.

[*la sociologie n’étudie que les comportements collectifs, ne pas la confondre avec la psychologie qui est le domaine de la psyché individuelle ]

 

Ce que j’expose dans cet article a fait l’objet d’une conférence à Laon en mai 2019. À l’invitation de mon ami Pascal Fechner, je tente ici de résumer par écrit ce qui fut dit à cette occasion et qui partait de l’hypothèse suivante : la compréhension que l’on a de cette affaire ainsi que l’idée même que chacun se fait du « vrai » et du faux », dépendent de la focale que l’on privilégie (consciemment ou  inconsciemment), c’est-à-dire de l’angle de vision adopté. Ces angles de vision sont déterminés par des jeux d’apesanteurs, allant du moins au plus.

 

 

Commençons par un jeu de rôle...

 

 

IMAGINEZ QUE VOUS ÊTES À LA FOIS UN SPATIONAUTE ET UN OBSERVATEUR SOCIAL... Puis suivez-moi dans un petit jeu d’apesanteur. Votre mission consiste, NON A JUGER DE LA VERITE DE L’AFFAIRE EN QUESTION, MAIS A OBSERVER LES COMPORTEMENTS HUMAINS ET INSTITUTIONNELS face à cette découverte des corps tridactyles. Nous allons procéder à l’observation de ce cas à partir de trois angles de vision. À chacun de ces stades, le spationaute qui vous habite va observer notre comportement collectif.

 

Sylvie 1

❶ J’observe ce qu'il s'est passé à partir du terrain, sur Terre

(FOCALE A - pesanteur maximale, le spationaute a encore les pieds sur Terre)

 

❷ Je « dézoome » et j’observe la planète d’un peu plus loin

(FOCALE B - légère apesanteur juste au dessus de la Terre)

 

❸ J’augmente l’apesanteur et j’observe à partir de l'espace

(FOCALE C –- apesanteur, ici la Terre apparaît au loin en vision spatiale)

❶ Le spationaute que vous êtes observe ce qu'il s'est passé à partir du terrain, sur Terre :

 

1er stade du jeu de rôle

 

Bien que vêtu d’une combinaison spatiale, vous avez encore les pieds sur la planète bleue, de sorte que votre vision est focalisée sur ce qu’il se passe au sol. Votre attention est happée par les individus habitant la planète bleue, leurs histoires de vie et leurs comportements de groupe, leurs points communs et leurs différences.

 

Selon cette perspective, votre attention est naturellement attirée par l’Histoire in situ de l’affaire Nazca, également par ses acteurs principaux, c’est-à-dire ceux qui portent et incarnent l’affaire dans toutes ses facettes. Que voyez-vous ? Que percevez-vous à ce stade ?

 

D’abord, vous prenez acte que la découverte de ces corps tridactyles commence dans une partie du désert péruvien le jour où, par le plus grand des hasards, des êtres humains tombent sur un site insoupçonné. A l’intérieur de ce site, ces derniers trouvent des corps secs insolites, puisqu’ils ont trois doigts aux pieds et aux mains, et sont entourés de divers objets. Ces corps sont des os recouverts d’organes et de peau apparemment momifiés, ils fascinent les êtres à l’origine de la trouvaille, puis, un peu plus tard, ceux qui apprennent leur existence.

 

Rapidement, naît un climat de tension palpable parmi la communauté au courant de cette mystérieuse découverte. Or, que fait notre espèce humaine confrontée à une telle découverte, quels sont ses premiers réflexes ?

 

Deux attitudes émergent rapidement : d’une part, les êtres humains s’approprient et cachent les choses mystérieuses, d’autre part ils se disputent l’interprétation de ces choses retrouvées, les uns disant que ces éléments sont ceci, les autres disant qu’ils sont cela. Vous l’aurez compris, ceci n’est qu’un résumé succinct et fort caricatural de la situation, néanmoins significatif de nos élans premiers, de nos pulsions et de nos choix.

 

A cet instant, une question s’impose : est-ce que cela ne vous rappelle rien ? Réfléchissez... 

 

A bien observer le type de réaction dont je viens de parler, vous ferez sans doute le parallèle avec le comportement des animaux, n’en déplaise à ceux qui pensent que nous n’avons pas grand-chose à voir avec eux.

En effet, à ce stade focal premier, on se rend compte que nous sommes une espèce parmi d’autres, et que nous ne nous comportons pas si différemment des animaux en terme de gestion de l’énergie psychique, d’archétypes et de schèmes.

Nos comportements sont pour ainsi dire ce que le socio-anthropologue et philosophe Gilbert Durant aurait appelé « le produit des impératifs bio-psychiques par les intimations du milieu » (G.Durand, 1992 : 39).

 

Ceci introduit un postulat d’éthologie humaine dans mon analyse, selon ce postulat l’humain est appréhendé en tant qu’espèce animale.

De façon plus poussée, observons de quelle façon il est possible d’établir une analogie avec le comportement animalier dans le déroulement de cette affaire Nazca.

 

L’analogie est observable au moins sur 4 points que je résume dans le visuel ci-dessous.

 

Sylvie 2

 

a) Naissance d’un climat de curiosité, d’émotionnalité et de tension autour de la découverte.

 

Tout le monde a déjà observé une meute de chiens, un attroupement de chats ou tout autre groupes d’animaux trouvant sur leurs chemins quelque chose de surprenant, d’intrigant, quelque chose qui attise la curiosité du groupe ou son appétit. En général, une tension perceptible surgit immédiatement, un climat d’effervescence, voire de curiosité partagée se met en place, presque une exaltation collective.

 

C’est exactement ce qu’il s’est passé à partir du moment où Thierry Jamin a mis en ligne ses vidéos autour des corps tridactyles, celles-ci font rapidement ce que notre postmodernité appelle le « buzz », les interviews des « pro » ou « contre » se multiplient dans une effervescence tonitruante, du moins pour ceux qui sont au courant de l’affaire.

 

b) Constitution de clans : les partisans de l’Alien Project et les détracteurs

 

Le clan est une parenté réelle ou fictive, de sang ou issue d’une situation sociale et tribale.

S’ensuit très vite une attitude clanique, courante chez les animaux : on sait, par exemple, que c’est la force du clan qui permet au loup de chasser en groupes sociaux structurés. Chez le lion le clan désigne le groupe auquel appartient l'ensemble des lions d'une même famille (mâles, lionnes et lionceaux) d’une même famille, et il arrive que deux clans de lions s’affrontent pour la possession d’un territoire... Idem pour un banc de poissons ou une volée de moineaux.

 

Dans l’affaire qui nous intéresse, des clans naissent et s’affrontent par les mots : l’Alien Project d’un côté, les détracteurs de l’autre. Évidemment, sauf exception, l’homme a appris à ne plus sauter à la gorge du clan adverse. Il sait qu’il n’a pas le droit d’attaquer son voisin, lois et sanction servent à lui rappeler cela, à freiner et contrôler cet élan, mais l’élan demeure et s’habille d’invectives alors verbales.

 

Que se passe-t-il ? Les mots se changent en projectile afin de créer des maux dans le clan adverse. Autrement dit, chez l’humain les mots remplacent les becs, les ongles, les crocs, il est un fait que dans cette affaire un clan agresse l’autre par discours interposé et inversement. Le mot se meut en projectile, il devient une manifestation de la force et de la puissance du groupe, aussi bien des « pour » l’affaire Nazca que des « contre »... Et celui

qui a assisté d’une façon ou d’une autre aux face à face entre partisans de l’Alien Project et

détracteurs sait bien cela !

 

Deux choses caractérisent l’utilisation des mots-projectiles au stade de la focale A :

 

- Ils sont généralement au service de vérités duelles, par exemple : il est bien ou mal d’analyser les corps tridactyles, c’est scientifique ou pas scientifique, éthique ou pas éthique, c’est sérieux ou c’est un « fake », etc. .

 

- Ils obéissent à de l’émotionalité collective ambiante, pourtant ils se veulent la plupart du temps rationnels, et c’est cela la différence majeure avec l’animal. L’animal qui attaque le membre d’un autre clan ne prétend à aucune rationalité, l’Homme oui.

 

Le mot et le discours servent à exprimer la puissance des clans en question, ils cimentent le lien du clan. Dès lors, tout support (article, radio, web, forum, etc.) devient l’occasion d’activer cet affrontement clanique entre les partisans de l’Alien Projet et les détracteurs. Des parentés fictives génèrent des clans, puis les clans se tirent dessus à boulet rouge, mais, à la différence des animaux, l’Humain justifie son comportement au nom de la plus grande rationalité, au nom de la plus grande éthique, au nom de la plus grande science ou objectivité....

 

Bref, au nom de la civilisation.

 

c) Installation d’une politique d’intimidation

 

L’intimidation est classique chez nos amis animaux. Ne voit-on pas les poissons, les grenouilles, les crapauds accroître leur masse corporelle ? Ne voit-on pas se développer des parures (pelage ou plumage) chez certains pour faire reculer l’intrus ? C’est aussi à cela que sert en partie la crête des reptiles, les ailes des oiseaux, sans oublier certains sons et odeurs spécifiques émis par l’animal pour intimider. Je ne me lancerai pas dans un développement de ces intimidations, car tel n’est pas le sujet, retenez simplement qu’il s’agit là d’une attitude répandue dans son principe, même si les formes sont diverses.

 

À nouveau, nous retrouvons ce facteur d’intimidation dans les comportements humains ayant opposé les partisans de l’Alien Project d’un côté, aux détracteurs rejetant l’importance de l’affaire de l’autre. En effet, des pressions psychologiques, des menaces, des propos diffamatoires, des procès, se sont succédés dans le cadre de l’affaire Nazca, toujours dans le but d’intimider la partie adverse. Le pelage, la plume ou la crête ont ainsi pris la forme du stylo et du procès verbal, pourtant la dynamique psychique à la base de ces actions demeure la même.

 

d) Affrontement au sujet de la légitimité

 

La légitimité se met en scène au coeur des espèces, et au niveau animalier elle s’établit en fonction de l’âge, du sexe, de la taille, de l’agressivité du sujet, etc. Concernant le cas Nazca, nous constatons que la question de la légitimité est au coeur du débat :

 

- D’une part, on remet en question la légitimité de Thierry Jamin : on lui reproche de ne pas avoir le profil du chercheur académique, certains vont s’employer à dévaloriser son diplôme, sa communication peu structurée ; d’autres décrètent que son look chapeauté à la Indiana Jones fait plus de lui un aventurier qu’un archéologue sérieux, laissant supposer qu’une découverte académique et sérieuse ne peut être que douteuse à parti du moment où le bonhomme est la copie presque conforme d’un héros de cinéma.

 

Sont également évoqués son lien avec les fameux haquéros (voleurs) à l’origine de la découverte dans le désert, ainsi que son lien avec le sulfureux journaliste et ufologue Jaime Maussan, etc . Autant d’éléments visant à lui ôter toute légitimité.

 

- D’autre part, on s’attaque à la compétence de la vingtaine de chercheurs et diplômés de haut niveau, venus des quatre coins du monde : médecins, radiologues, généticiens, chirurgiens et autres scientifiques ayant examiné les momies in situ et procédé aux analyses. Détracteurs et scientifiques leur reprochent de ne pas appliquer les bons protocoles, de ne pas utiliser la bonne technologie, ils sont taxés par eux de mauvais experts, de scientifiques de pays sous-développés, ils sont également qualifiés de naïfs et j’ai même entendu dire qu’ils faisaient partie d’un complot ou d’une secte, etc.

 

Inversement, la vingtaine de scientifique ayant ausculté et étudié jusqu’au fin fond de l’ADN ces corps tridactyles, accusent leurs collègues de manquer de la plus élémentaire rigueur scientifique en émettant une opinion strictement virtuelle fondée sur l’image (télémédecine). Autrement dit, les scientifiques soutenant l’Alien Project affirment à leur tour que ceux qui n’ont jamais examiné ces corps tridactyles sont non légitimes pour en parler. En effet, rappelons que les détracteurs ont toujours refusé d’approcher les corps et donc de prouver leurs accusations, malgré les incessantes invitations de Thierry Jamin à le faire...

 

Bref, tout le monde remet en question la légitimité de l’autre en long, en large et en travers.

 

Bilan de la Focale A : Revenons un instant au jeu de rôle. Que note le spationaute et observateur

de terrain que vous êtes dans son carnet ?

Que les êtres de la planète Terre réagissent à ce stade de pesanteur, comme des êtres en grappe, en clan, en tribu, en horde, en essaim, en banc. Ils adoptent souvent

DES COMPORTEMENTS RÉFLEXES OBÉISSANT AUX MÊMES ARCHÉTYPES ET ÉLAN PREMIERS QUE LES ANIMAUX...

LA DIFFÉRENCE MAJEURE ENTRE LES ANIMAUX ET NOUS ÉTANT QUE NOUS JUSTIFIONS NOS COMPORTEMENTS AU NOM :

- DE LA RATIONALITÉ,

- DE L'OBJECTIVITÉ,

- DE LA CONNAISSANCE

- ET DES VALEURS MORALES 

 

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